Il y a environ 30 ou 40 ans, les perroquets élevés en captivité sont devenus de plus en plus populaires. À ce moment, l'incubation artificielle et l'élevage à la main des bébés perroquets étaient
souvent nécessaires pour différentes raisons. Les principales raisons invoquées étaient que les parents abandonnaient les œufs ou les jeunes, mutilaient ou n'élevaient pas leur propre
progéniture.
Il a même été suggéré qu'il serait possible, par le biais de l'incubation artificielle, d'élever l'oisillon presque parfaitement, prétextant que que les jeunes apprendraient l'auto-mutilation,
l'hyper-vocalisation, le harcèlement d'un congénère ou de mauvaises habitudes alimentaires si on les laissait être élevés par leurs parents. (Jordon 1989)
Il y a différentes raisons qui ont amené à considérer nécessaire d'élever à la main un perroquet : erreurs de gestion en matière de logement, de nutrition et de soins, complétées par un manque de
connaissances sur le comportement naturel des perroquets. La plus commune des raisons invoquées est encore que les parents ne veulent pas élever leurs petits quand les jeunes ne sont pas en bonne
santé ou ne sont pas viables en raison d'une alimentation déficiente, ainsi que d'autres facteurs de stress.
Mais l'amélioration des soins, de l'environnement des perroquets, ainsi que l'acquisition de connaissances supplémentaires sur leurs besoins diminuent la nécessité de l'élevage à la main.
Depuis les 30 dernières années nous connaissons une demande croissante pour les perroquets en tant qu'oiseaux de compagnie. Les éleveurs et les animaleries ont fait de la réclame pour de
bébés perroquets apprivoisés, non sevrés et élevés à la main, suggérant qu'il était bénéfique d'acheter un bébé perroquet non sevré aussi jeune que possible pour s'assurer que le perroquet
deviendra le « parfait oiseau de compagnie apprivoisé ».
En même temps, sachant que l'élevage à la main est un travail intensif, il existe un avantage économique de vendre des oiseaux non sevrés pour les éleveurs. La fin du sevrage est donc à la charge
de l'acheteur.
Les aviculteurs ont commencé à expérimenter l'incubation artificielle ou à séparer le bébé de ses parents en utilisant des techniques de nourrissage à la main ce qui a incité les femelles à
pondre des œufs de plus en plus souvent.
L'élevage à la main est ainsi devenu une partie de la pratique de l'aviculture parce que les résultats de l'incubation des œufs et de l'élevage à la main permettaient d'avoir enfin une entreprise
rentable.
La raison pour laquelle les éleveurs considèrent comme peu dociles les bébés élevés par leurs parents est que ces parents ne sont pas apprivoisés. Quand les oiseaux sont apprivoisés et qu'ils
deviennent à leur tour reproducteurs, on peut constater chez les petits ensuite élevés par leurs parents, qu'ils apprennent à travers l'éducation de ces derniers qu'il n'y a pas lieu d'avoir peur
des humains du foyer. (Hooimeijer J., J.M. Pericard 2009, Engebretson M. 2006)
Les effets négatifs de l'incubation artificielle et de l'élevage à la main des bébés perroquets
Au cours de ces 15 dernières années, les données qui nous sont disponibles démontrent les conséquences négatives de la séparation des bébés perroquets de leurs parents et la vente de bébés
perroquets non sevrés. Comme chez d'autres animaux, y compris l'homme, l'incubation des œufs et l'élevage des oisillons à la main sont des méthodes où l'on sépare les jeunes des parents avant ou
pendant l'importante phase de l'empreinte, ce qui peut causer des problèmes de comportement irréversibles.
Des indications démontrent que certains des problèmes de comportement chez le perroquet peuvent survenir après des mois ou même des années, et c'est particulièrement vrai quand l'oiseau arrive à
maturité sexuelle. Une gamme de problèmes de comportement ont été reconnus chez la souris, les primates, les perroquets et les humains comme des conséquences de la séparation des jeunes des
parents. La privation sociale, tout au long de la période juvénile, mène à des anomalies comportementales durables et des déficits sociaux et émotionnels graves. L'anxiété, les phobies, les
morsures, le picage et l'automutilation sont quelques unes des possibles conséquences graves du sevrage précoce et de la séparation d'un bébé perroquet des parents (Engebretson M. 2006, Garner
JP, Meehan CL, Mench JA 2003).
La conséquence de l'incubation des œufs et de la séparation des oisillons à un jeune âge est que les femelles pondent des œufs plus souvent par rapport à si nous laissions faire la nature.
D'après l'auteur, ceci peut expliquer l'incidence négative sur l'espérance de vie des femelles. Pondre des œufs de plus en plus souvent a un effet négatif sur la qualité des œufs et sur la
viabilité des jeunes (J. Hooimeijer 1999). Les risques de l'élevage à la main sont, les brûlures ou le blocage du jabot, les infections, un sevrage trop tôt ou la malnutrition (et la faim). Selon
l'expérience de l'auteur, le poids des oisillons en fin de sevrage est de 10 à 15% inférieur au poids normal. Des études ont montré que les poussins élevés à la main ont développé plus de
malformations squelettiques par rapport aux poussins élevés par leurs parents (Harcourt-Brown N 2004).
Il existe des données qui montrent que les bébés perroquets qui sont séparés de leurs parents sont plus vulnérables aux maladies infectieuses, parce que leurs systèmes immunitaires sont moins
bien développés. L'une des raisons décrites est que la manipulation néonatale est stressante. (Phalen D.N. , Wilson VG , Graham DL 1994).
Parmi d'autres travaux scientifiques, une partie des références est une dissertation inaugurale, à l'Université de Berne en 2004 par Schmid, sur l'influence de la méthode d'élevage sur le
comportement des Gris du Gabon adultes. Cette étude expose les différences dans les problèmes de comportement entre les perroquets élevés à la main et les perroquets élevés par les parents. Elle
a montré que les Gris du Gabon élevés à la main développent plus de comportements agressifs et sont plus sélectifs envers les humains que les perroquets élevés par les parents. Elle a également
mis en évidence que les oisillons qui ont été séparés de leurs parents à un âge inférieur à 5 semaines ont développé plus de comportements stéréotypés par rapport aux oisillons qui ont été élevés
par les parents plus longtemps.
Lors d'une recherche de Myers (1998), portant sur les Perruches Calopsittes (Nymphicus hollandicus) on a pu constater que le vol en couple d'oiseaux ne se produit que dans les cas où les mâles
ont été élevés par les parents. Les femelles élevées à la main, quant à elles, produisent plus d’œufs stériles et d'œufs pondus en dehors du nid et plus souvent qu'avec des femelles élevées par
les parents.
Conclusion
Les perroquets sont parmi les animaux les plus attachants, intelligents et sociaux jouissant d'une espérance de vie très élevée. Il est de la responsabilité des vétérinaires et des éleveurs de
prévenir les problèmes et d'améliorer le bien-être des perroquets en captivité. Considérant les données disponibles et sur la base de l'expérience actuelle, il y a tout lieu de conclure que
l'élevage à la main des bébés perroquets n'est pas dans le meilleur intérêt de la santé et du bien-être des perroquets. Les bébés perroquets devraient avoir le droit d'être élevés par leurs
parents au moins jusqu'au sevrage. Il n'est pas dans le meilleur intérêt des femelles d'être manipulées et forcées d'avoir plus d’œufs en raison des intérêts commerciaux des éleveurs.
Traduction de Christiane Gervais
Texte original sur fosterparrots.com
© Marine Scié, mars 2014.